Avis sur la 5G et son déploiement

En préambule disons qu’une avancée technologique, fut-elle « révolutionnaire », n’est pas nécessairement un progrès humain. L’invention de la bombe atomique fut le résultat d’une formidable découverte sans que l’on puisse la placer parmi les bienfaits du progrès ! De plus, il ne suffit pas qu’un produit soit nouveau pour qu’il emporte l’adhésion, voire la dévotion à son endroit, encore faut-il qu’il fasse preuve de son utilité et d’absence de dangerosité. Tel n’est pas le cas pour la 5G.

L’augmentation de la vitesse et de la capacité de transfert de données numériques par rapport au standard actuel (4G pour ceux qui peuvent en bénéficier, ce qui n’est toujours pas le cas partout !) n’est d’aucune utilité pour le citoyen moyen. Qui a besoin de réduire de quelques millisecondes le transfert de la photo du petit dernier dans la neige ? Tandis que le « streaming » a remplacé le téléchargement de données audiovisuelles, qui a besoin d’acquérir, de façon quasi-instantanée sur son portable, le dernier clip ou le dernier film à la mode ? Ces avantages technologiques seront prochainement  à disposition de tous grâce à la fibre optique sur les appareils « fixes ». La 5G est juste susceptible d’étendre ces possibilités aux  téléphones mobiles (« smartphone » dans la novlangue ultralibérale). Les partisans de la 5G mettent en avant les bénéfices de cette technologie pour les entreprises. À supposer que quelques-unes aient réellement besoin de cette rapidité et de cette capacité, il reste à démontrer que la connexion à la fibre optique ne suffit pas à combler ces besoins.

Les désavantages sont nombreux. Il y a tout d’abord l’explosion de la propagation d’ondes supplémentaires dont il n’est pas possible d’affirmer qu’elles sont sans risques. Les nouvelles antennes ne remplaceront pas les anciennes mais viendront s’y ajouter. La multiplication des usages du numérique, notamment dans la domotique, entraînera, à l’extérieur, une augmentation du nombre d’antennes et à l’intérieur des maisons une foison d’émissions d’ondes dont on peut douter de l’innocuité, notamment pour les personnes les fragiles

Économiquement, les seuls bénéficiaires de cette « révolution » sont, d’une part, les grands groupes de fabricants, tous situés hors de nos frontières européennes, puisqu’il sera nécessaire de changer de matériel, notamment les smartphones, dont les prix risquent fort d’augmenter sérieusement. Les autres bénéficiaires sont les fournisseurs de contenus, mais surtout les détenteurs des fameux (et incinérables) centres de données (data centers).

Écologiquement les conséquences du passage à la 5G seront dramatiques. La débauche de nouvelles utilisations de matériels « connectés » entraîne, de facto, une augmentation de la demande en énergie, en minerais et terres rares, non renouvelables et dont l’extraction s’opèrent dans de nombreux pays au prix écologique et humain normalement intolérable (montagnes rasées, hommes massacrés, femmes violées, enfants surexploités notamment dans certaines régions d’Afrique, pour quelques kilogrammes de coltan, etc.). La plupart des alliages utilisés pour les appareils « numériques » ne sont pas recyclables. C’est donc un accroissement du pillage des ressources qui s’accélère pour une utilité sociale à peu près nulle !

Plus fondamentalement, chaque nouvelle avancée technologique, dans le domaine du numérique particulièrement, est un pas de plus vers une société déshumanisée. La démultiplication du stockage des données concernant tous les actes de la vie quotidienne conduit à enfermer chaque individu dans un monde de plus en plus réduit. Aujourd’hui, déjà, les données issues de chacun de nos « clics » lorsque nous sommes connectés à internet sur nos ordinateurs et autres écrans, sont traitées par des algorithmes destinés à définir un profil individuel en vue de nous proposer des publicités personnalisées. Ce qui revient, progressivement, si l’on n’y prend pas garde, à nous figer dans un réduit culturel et social, nous privant des curiosités susceptibles de nous enrichir des univers inconnus. C’est une robotisation lente mais certaine de l’être humain que le monde des « datas » est en train d’accomplir. Le déploiement de la 5G, et les justifications qui l’accompagnent, cautionne et amplifie cette évolution vers une société technocratique totalitaire. Décidément, non, la 5G ne peut pas être considérée comme un progrès humain !

Réflexions sur la convention acceptant la participation financière d’AXA aux travaux du Château de Joux

Les conditions de participation de la compagnie d’assurance AXA au côté de la Fondation du patrimoine pour le financement de certains travaux de restauration du château de Joux sont inscrites dans une convention de 9 pages. Le nom de la Fondation y figure à 70 reprises, soit près de 8 fois par page. La compagnie d’assurance y est nommée 45 fois, soit sous son le nom d’Axa (32 fois), soit comme le « mécène » (2 fois), soit sous le vocable issu de la mythologie « Mécène », avec un M majuscule pour 11 occurrences. Les travaux concernés sont : la restauration des pont-levis, du pont dormant et de la porte d’honneur. Ils sont chiffrés, dans la convention à 985 836 € (1). Les 100 000 € promis par AXA viennent s’ajouter aux 107 000 € de la mission Bern.

L’article 2 est intéressant. Il stipule que l’aide financière de 100 000 € correspond à 10% du montant prévu des travaux. « L’aide financière de la Fondation du patrimoine ne sera pas revue en cas de dépassement du budget prévisionnel de l’opération » mais s’il advient que la facture finale soit moins élevée « le taux de l’aide financière […] pourra être appliqué au coût réel ».
Une philanthropie à contrepartie. L’article 5.2 encadre les contreparties que la CCGP doit concéder au mécène. Ces contreparties peuvent être « en communication, relations publiques (…) dont le coût pour la CCGP ne doit pas excéder « 25% du don » ! afin de permettre au donateur d’accéder aux réductions d’impôt. Entre autres, il conviendra d’apposer une plaque pendant au moins cinq ans mentionnant la participation de la Fondation et du mécène. C’est ce qu’on appelle une générosité « bien ordonnée » !

C’est peut-être l’article 6 qui est le plus étonnant, du moins si l’interprétation que nous lui donnons est exacte. Il s’intitule « Clause d’exclusivité » et stipule : « Pour la réalisation du projet faisant l’objet de la présent convention de financement, la Fondation du patrimoine et le Maître d’ouvrage s’engagent à ne pas s’associer avec des sociétés concurrentes du Mécène (…). Il est entendu que les sociétés concurrentes d’AXA sont définies comme étant les entreprises du secteur de la banque et de l’assurance ». Cette clause interdit donc d’accepter des financements de banques non filiales d’AXA ou d’autres compagnies d’assurance.

À la lecture de cette convention on peut se demander qui gagne le plus ! La CCGP ou le deuxième assureur européen ?

(1) Il ne s’agit là que d’une première tranche des travaux prévus sur dix ans et dont le coût sera de plusieurs (dizaines de ?) millions.

Conseil communautaire du 4 mars 2021

PROJET ALIMENTAIRE TERRITORIAL

Le premier sujet d’importance concerne l’engagement de l’intercommunalité dans un Projet Alimentaire Territorial (PAT). Il n’aura fallu qu’un peu plus de six ans pour que le Grand-Pontarlier réagisse aux possibilités ouvertes par la loi du 13 octobre 2014, dite « d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt ». Constatant que « les enjeux autour de l’alimentation sont nombreux et les systèmes alimentaires territoriaux [sont] complexes avec une multitude d’acteurs qui ne partagent pas tous les mêmes intérêts et les mêmes finalités » (extrait de la délibération), la loi a donc institué les PAT, visant à « créer une synergie des acteurs sur la base d’un diagnostic partagé, autour d’orientations élaborées collectivement et à impulser des actions partenariales permettant de concrétiser ces orientations » (toujours extrait de la délibération).

Petite note d’humeur au passage : de ces citations, issues du texte de loi et reprises dans la délibération du conseil communautaire, retenons : enjeux –systèmes –territoriaux (ça, ça fait très bien !) – complexes – multitude – acteurs (très bien aussi !) – synergie (le top !) – diagnostic partagé (super top !) – élaboration collective – impulser – actions partenariales. Avec ce matériau, nous pouvons construire n’importe quel projet, y compris celui de mettre beaucoup de vent dans une chambre (des dépiutés) à air !

Concrètement, de quoi s’agit-il ? De réorganiser la production et la distribution d’aliments sur un territoire donné avec l’ambition d’assurer «à la population l’accès à une alimentation sûre, saine, diversifiée, de bonne qualité et en quantité suffisante, produite dans des conditions économiquement et socialement acceptables par tous, favorisant l’emploi, la protection de l’environnement et des paysages et contribuant à l’atténuation et à l’adaptation aux effets du changement climatique».
Cette dernière citation, également reprise dans la délibération, est extraite du Programme National pour l’Alimentation. (PNA – à défaut de nourriture on peut se gaver de sigles et acronymes divers !).
À noter que ce programme a été mis en place pour la période 2019 – 2023, faut se magner ! Le texte est un peu plus concret et notoirement plus ambitieux que le jargon de 2014. Est-ce bien un engagement dans cette voie que la communauté de communes du Grand Pontarlier a pris en répondant à un appel à projet dans le cadre de ce PNA, permettant surtout de financer un poste pour réaliser le fameux « diagnostic partagé » et élaborer un cadre stratégique pour l’avenir ?
Les élus représentant la Ville de Pontarlier membre du Groupe « Pontarlier, ville écologique et solidaire », en saluant ce début de démarche, ont rappelé qu’il ne faudrait pas que cela ne soit qu’un effet d’affichage. Connaissant la situation de l’activité agricole dans le secteur, dominée par la production de « lait à comté », et la propension à poursuivre l’urbanisation de terres agricoles, il ne faut pas minimiser les difficultés qu’il pourrait y avoir à dégager des surfaces foncières permettant l’installation de nouvelles productions ! Bien sûr, le président de la CCGP a assuré que l’engagement était fort et déterminé. Comme dit l’autre en matière d’alimentation, « ça mange pas de pain » !. À suivre…

COMPETENCE MOBILITE

Deuxième sujet d’importance : le transfert éventuel de la compétence « Organisation de la mobilité » à la communauté de communes. On peut remarquer que c’est encore l’application d’une décision nationale qui tient lieu de choix politique local. On n’allait quand même pas anticiper ! C’est « la loi LOM qui impose aux AOM de définir une politique de mobilité adaptée à leur territoire et d’en assurer le suivi et l’évaluation » En clair, LOM : Loi d’Organisation des Mobilités (24 décembre 2019) et AOM : Autorité Organisatrice de la Mobilité. Il s’agit de savoir si la CCGP se donne cette compétence ou si elle la laisse à la Région. Le code des transports (pas encore « des mobilités » ?) stipule qu’une autorité organisatrice de la mobilité « est compétente pour organiser, sur son territoire :
– des services réguliers de transport public de personnes, urbains ou non urbains ;
– des services à la demande de transport public de personnes ;
– des services de transport scolaire ;
– des services relatifs aux mobilités actives (1) (ou contribution à leur développement) ;
– des services relatifs aux usages partagés des véhicules terrestres à moteur(2) (ou contribution à leur développement) ;
– des services de mobilité solidaire. »

(1) on n’a pas encore la traduction de ce vocable, ni du reste de son probable antonyme « mobilités passives »
(2) ce qui exclut les tandems et les canoë biplaces

À l’unanimité, le conseil communautaire a approuvé « le transfert de la compétence « Organisation de la Mobilité » à la Communauté de Communes du Grand Pontarlier » (3).

(3) libellé complet de la décision, majuscules comprises
Une remarque : le dictionnaire nous apprend qu’une lettre majuscule se place au début d’une phrase ou d’un nom propre. Serions-nous donc, avec cette décision, au commencement d’une ph(r)ase de développement de la mobilité propre, donc non polluante ? On rêve…

Mobilités douces ET transports collectifs

Un rappel : lors du conseil communautaire du 27 janvier dernier, il était proposé d’adopter les éléments de cadrage de l’étude « Schéma directeur intercommunal des mobilités douces ». Les élus « Pontarlier, ville écologique et solidaire » s’étaient opposés à cette décision, estimant que la mise en œuvre d’un réseau de mobilités douces devait s’inscrire dans un schéma plus vaste, remettant « à plat » l’intégralité des modes de déplacement, et intégrant dans les alternatives au « tout-pour-l’auto » les transports collectifs. En clair, ils demandaient que soit élaboré un nouveau « plan de mobilités » (autrefois appelé « plan de circulation »).
La réponse donnée par le président pour ne pas prévoir de transports collectifs urbains était que ce n’était pas une compétence de la CCGP ! Il n’aura donc fallu qu’un peu plus d’un mois pour que cet écueil soit levé. Grande nouvelle : la communauté de communes du Grand Pontarlier a désormais la compétence pour organiser, entre autres, « des services réguliers de transport public etc… » Euh, pas tout à fait quand même.

D’une part pour que la délibération du conseil s’applique il faut que les dix communes l’adoptent également, à la majorité qualifiée(4).

Ensuite, et afin de ne pas effrayer, la délibération précise qu’une « AOM n’a pas l’obligation d’organiser l’un ou l’autre des services » détaillés plus haut. En toutes lettres : « La LOM n’impose pas aux AOM une obligation d’exercice des compétences mobilités mais les habilite simplement à s’emparer de ces différentes missions » ! Pour être complètement tranquille le président insiste sur le fait que les transports scolaires actuellement à la charge de la Région le restent. Il n’y a donc pas de risque que la mise place de transports urbains intercommunaux n’entraîne, pour leur financement, la création du « versement mobilités » (autrefois appelé « versement transports »), payé par les entreprises de plus de 10 salariés, perspective rejetée farouchement par le président.

(4) 2/3 des communes représentant plus de la moitié de la population, ou l’inverse, soit la moitié des communes représentant les 2/3 de la population. Ou peut-être autre chose. On est preneur d’une définition juridiquement certifiée.

Versement mobilités

En quoi consiste ce « versement mobilités » ? Il s’agit d’une taxe sur la masse salariale dont le taux est fixé par la collectivité locale concernée. À titre d’exemple, la communauté d’agglomération de Lons-le-Saunier a fixé un taux de 0,35%, tandis que Dole ou Vesoul sont à 0,6%, Besançon et Montbéliard à 1,8%. Pour paraphraser l’expression populaire « point d’argent, point de suisse » (5) : « point de taxe, point de transports ».

(5) Expression reprise par Racine dans « Les plaideurs »

LIGNES DIRECTRICES DE GESTION

Troisième dossier consistant : la présentation des « Lignes directrices de gestion ». Encore la mise en application d’une obligation nationale énoncée dans la loi du 6 août 2019 dite de « Transformation de la fonction publique ». Ces Lignes directrices de gestion « déterminent la stratégie pluriannuelle de pilotage des ressources humaines dans chaque collectivité ». Discutées avec les représentants du personnel elles constituent un cadre donnant de la clarté et de la visibilité, notamment pour les parcours professionnels des agents, et les conditions d’avancement et de promotion. Outil de dialogue social pour les trois collectivités, Ville de Pontarlier, Communauté de communes et Centre communal d’action social, les lignes directrices de gestion feront l’objet d’évaluation et de réajustement au sein des différentes instances de représentation du personnel. Rien de particulier à en dire dans l’immédiat.

LA VIE DU CHATEAU

Plusieurs délibérations ont concernées le château de Joux, particulièrement en vue de l’organisation des animations et spectacles de la saison d’été que l’on espère possibles ! Une convention cependant a posé problème aux élu.e.s « Pontarlier, ville écologique et solidaire ». Il s’agit de la participation de la Fondation du patrimoine, alimentée comme on le sait par un loto spécial, pour 100 000 € dans la réfection de quelques éléments du château, notamment les ponts-levis. Cette subvention est couplée avec un « mécénat » de la compagnie d’assurance AXA. Les élu.e.s « Pontarlier, ville écologique et solidaire » ont proposé de refuser cette subvention en rappelant l’attitude de l’assureur vis-à-vis de nombreux restaurateurs touchés par la crise sanitaire à  qui elle refuse le paiement d’indemnités pour perte d’exploitation. Des restaurateurs d’Annecy, Marseille, Lille, Mont-de-Marsan ont engagé des procès pour obtenir gain de cause. Si l’on considère que les restaurants sont des structures participant à la vie touristique il paraît incongru, voire inconvenant, de voir associé le fleuron du tourisme de la CCGP à une firme qui les respecte peu. La proposition a fait réagir le président avec sa mesure habituelle, insistant sur la nécessité de distinguer la vie nationale et la politique locale. En gros, du moment qu’il y a du blé, il faut le prendre quelle qu’en soit la provenance ! Les laborieuses explications du vice-président chargé de l’économie tentant de convaincre  que « les contrats d’assurances, c’est compliqué » achevaient de redonner à AXA sa pureté légendaire. L’assemblée n’a pas suivi la proposition de refus soutenue par seulement 3 voix. On peut lire par ailleurs une analyse édifiante de la convention qui lie désormais la CCGP et la Fondation du patrimoine.